La scénographie politique se compose de deux grands moments : celui de la conquête du pouvoir, celui de son exercice. Le pouvoir, avant de l’exercer, il faut le conquérir. Et pour le conquérir, à moins de le prendre par la force, il faut en passer par la parole. Aussi le moment de conquête du pouvoir est-il le moment qui condense, à travers la mise en scène du discours, tous les ingrédients du combat politique qui se joue dans l’espace social. Il est le lieu d’entrecroisement des paroles des politiques, de celles des journalistes, des commentateurs, des penseurs, mais aussi de celles des mouvements sociaux qui témoignent des opinions publiques, toutes ces paroles interférant les unes sur les autres en une mystérieuse alchimie.
La conquête du pouvoir est donc première dans l’ordre du politique, mais on ne peut dissocier ces deux moments, car le processus de délégation du pouvoir par l’instance citoyenne se fonde en démocratie sur un double rapport de confiance et de vigilance : l’idéalité sociale promise lors d’une campagne électorale engage l’action politique à venir, mais sous surveillance.
Dans le face à face entre peuple et politiques se jouent plusieurs parties : la façon dont se construisent les opinions, les stratégies de persuasion que les politiques mettent en scène, parfois à leur insu, les valeurs qui sont débattues sur fond d’imaginaire social marqué par l’histoire d’un pays. C’est à décrire ces aspects que s’emploie cet ouvrage. Il en ressort la mise en évidence d’une nouvelle donne politique dans laquelle les extrémismes de gauche et de droite disparaissent sous une radicalité populiste qui balance entre le désir de discipline mâtiné d’esprit autoritaire (la république), et l’aspiration à la liberté teintée d’esprit révolutionnaire (la démocratie).